Communiqué

par Ajma

L’AJMA demande la libération de l’écrivain Boualem Sansal

«…l’émotion soudain exprimée par certains succédait à leur indifférence d’hier.»
Pierre Vidal-Naquet, « Mémoires »
À propos des sévices policiers subis en 1962 par les hommes de L’OAS.

L’arrestation en Algérie de l’écrivain Boualem Sansal, comme peu auparavant l’interdiction du livre de Kamel Daoud, « Houris », font débat en France mais parlent surtout de l’Algérie.
Avec cette arrestation et cette interdiction, le gouvernement algérien piétine les droits et libertés fondamentaux. En introduisant la force dans le champ des lettres, il interdit le débat et l’échange.
Nous condamnons cette arrestation arbitraire et cette censure avec d’autant plus d’aisance que nous ne partageons ni les positions, ni les propos de Boualem Sansal. Son arrestation a déclenché dans certains médias français des réactions anti-musulmanes et xénophobes, qui nous indignent et nous révoltent.
De la même façon, nous avions condamné les arrestations de journalistes qui avaient couvert le hirak algérien, en particulier Khaled Drareni et Ihsane El Kadi. Nous n’avions pas beaucoup entendu alors ceux qui, aujourd’hui en France, se rallient opportunément à la cause de Boualem Sansal tout en pourfendant ceux qui osent le critiquer.
Ce n’est pas parce qu’il est victime qu’il a raison.
Mais c’est aux autorités algériennes que cette arrestation donne tort.
L’Algérie est un grand pays qui s’est libéré du colonialisme et a acquis sa liberté avec courage et détermination. Ce courage et cette détermination étaient au service de valeurs indivisibles et universelles. Lors de son congrès de la Soummam en 1956, le FLN avait pour objectif la citoyenneté de tous « sous la forme d’une république démocratique et sociale ». À quoi auront servi le combat et la mort de nombreux combattants, dont Maurice Audin, si c’est pour être intellectuellement asservi ?
Après l’indépendance algérienne, après avoir largement contribué à faire la lumière sur la mort de Maurice Audin mais aussi sur la torture et les exécutions subies par ses camarades anticolonialistes, l’historien Pierre Vidal-Naquet condamna aussi la torture dont avaient été victimes des militants de l’OAS (L’OAS et la torture – Revue Esprit, mai l962). Cela signifiait-il qu’il partageait leurs idées ? Non, bien au contraire. Ce qu’il condamnait, c’était la torture, quelles qu’en soient les victimes. La défense des libertés ne souffre aucune exception.
L’AJMA avait salué la libération par le président Tebboune, le 1er novembre, de contestataires algériens, dont le journaliste Ihsane El Kadi. Aujourd’hui nous conjurons le gouvernement algérien, au nom des valeurs qui ont fondé la lutte de libération de son pays, de libérer Boualem Sansal.

Paris le 07 décembre 2024

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